- Poste occupé:
- Professeur et chercheur
- Organisation:
- UQAM
- Type de formation (1):
- Formation universitaire (Doctorat, Post-doctorat)
- Programme de formation (1):
- Doctorat en sociologie économique
- Types de professionnel-le:
- Professionnels-les de recherche
- Secteurs d'organisation:
- Avancement de l’éducation
- Types d'organisation:
- Oeuvres de bienfaisances (OB)
Pourriez-vous vous présenter ?
J’enseigne au département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) depuis 1995. Je suis anthropologue/sociologue de formation, spécialisé dans le domaine de la sociologie économique. Mes thèmes de recherche sont l’économie sociale, les actions collectives socialement innovantes, la revitalisation socio-territoriale en milieu urbain, la philanthropie subventionnaire et la recherche partenariale. Au plan professionnel, je codirige avec Peter Elson de Victoria University un important programme de recherche partenariale sur la philanthropie subventionnaire canadienne (PhiLab), lequel est financé, depuis 2013, par le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada. Enfin, je suis responsable depuis 2006 de la collection Innovation sociale aux Presses de l’Université du Québec
Qu’est-ce qui vous a amené à faire de la recherche en philanthropie ?
Le fait de travailler depuis le début des années 1980 avec des organismes à but non lucratif, dont certains avaient le statut d’œuvre de bienfaisance, fait en sorte que ma carrière de chercheur est intimement liée au secteur philanthropique. Par contre, avec la philanthropie institutionnelle ou subventionnaire, mon premier vrai contact remonte à 2000 au moment de la création de la Fondation Lucie et André Chagnon. Je fus alors approché, en association avec Patrice Rodriguez, pour développer, avec cette Fondation naissante, une réflexion sur l’évaluation des résultats.
Pouvez-vous définir et expliquer en quoi consiste votre activité et/ou fonction au sein du secteur?
Je peux me définir à la fois comme un idéateur, i.e. une personne qui s’est donné pour objectif de travailler à la structuration de la recherche partenariale en philanthropie subventionnaire, et un chercheur œuvrant au co-développement de nouvelles connaissances avec les acteurs de cet écosystème. Les objectifs que je poursuis, par et dans le croisement des savoirs avec des organisations de l’écosystème philanthropique, tiennent essentiellement au besoin d’appuyer, par la recherche, le processus de transition sociale et écologique requis pour répondre aux grands enjeux sociétaux auxquels nous sommes présentement confrontés. La science et la recherche en milieu universitaire ont une responsabilité sociale vis-à-vis le ou les modèles civilisationnels à mettre en place afin d’assurer un mieux vivre ensemble et surtout le déploiement d’une communalité universalisante.
Quelle est votre formation académique? En quoi est-ce pertinent par rapport au secteur étudié ?
Ma formation est partagée entre la discipline anthropologique (baccalauréat et maîtrise en ethnologie) et la sociologie (doctorat en sociologie économique). Dès la fin de mes études de maîtrise à l’Université de Montréal, j’ai obtenu une bourse d’études post-maîtrise du gouvernement japonais. Un séjour de deux années à l’Université publique d’Osaka m’a permis de comprendre toute l’importance de la question des enjeux sociaux et écologiques. À mon retour du Japon, j’ai obtenu un poste à l’Université de Saint-Boniface, où j’ai pu m’impliquer dans une initiative locale, Nouvelle économie urbaine francophone (NEUF). Cette expérience a directement orienté mon retour aux études afin de réaliser un doctorat sur les Corporations de développement économique communautaire montréalaises.
Parlez-nous rapidement de votre parcours professionnel ?
Si nous prenons comme point de référence mon entrée à l’UQAM, mon parcours professionnel est partagé entre des activités d’enseignement, de recherche partenariale et de gestion de projets ou de structures institutionnelles. Sur ce dernier point, j’ai réalisé deux mandats de direction à l’UQAM : celle du module d’Animation et recherche culturelles (2000-2003) et celle du département de sociologie (2010-2013). Au niveau de la recherche partenariale, mentionnons les travaux effectués sur le grand thème du « développement local », ce qui m’a permis d’intégrer en 2000 le Centre de recherche sur les innovations sociales (CRISES). Enfin, le travail de codirection d’une importante subvention de recherche partenariale est revenu à l’avant plan avec l’obtention de deux subventions du CRSH, en 2013 et en 2018
Quels sont les défis et enjeux liés à votre fonction dans ce milieu ?
En toute honnêteté, le premier défi a été académique : bien comprendre et connaître l’univers des fondations subventionnaires. La première subvention que nous avons gérée a permis une mise à niveau et une insertion élargie dans le secteur. Depuis nous ne cessons d’approfondir notre culturalité du secteur. Le deuxième défi est d’apporter une contribution significative et critique pour la science, pour le secteur et la société. Par contribution significative critique, nous entendons à la fois le développement des connaissances factuelles et théoriques, mais aussi la construction d’un point de vue critique fondé sur le dépassement d’un certain conformisme de pensée dans lequel est enfermé le secteur philanthropique. Le troisième défi est de s’assurer que le travail de développement que nous faisons puisse s’institutionnaliser.
Comment définissez-vous la philanthropie aujourd’hui ? Quel peut-être l’impact d’une telle définition?
Ma définition de la philanthropie est partagée entre une compréhension large et située. Par définition large, j’entends la posture repérée chez les philosophes sophistes de la Grèce antique à l’effet de qualifier tout geste bienveillant à l’égard d’autrui d’acte philanthropique. Par définition située, j’entends la forme moderne de la philanthropie où se mélangent en un écosystème fonctionnel – bienveillance, entraide, solidarité, investissement privé pour produire de l’intérêt public et charité – afin de constituer un ensemble de pratiques informelles (artisanales) et formelles (incorporées) donnant place à des organisations simples (faible réseau, peu de ressources) ou complexes (fortement structurées et bien dotées en ressources).
Quels conseils donneriez-vous à une personne qui souhaite exercer votre profession/activité ?
Le métier de « chercheur-acteur » (néologisme) demande un brin d’idéation, beaucoup d’écoute, un filet de confiance en soi et en autrui, un soupçon de patience (à renouveler fréquemment), un tantinet d’utopisme associé à une touche de réalisme, une once de rigueur multipliée par dix, un relent de méthode, une brassée de belle folie…
Une dernière chose à ajouter ?
Oui, un coup de cœur pour la lecture d’une œuvre récemment parue et parcourue avec avidité : celle d’une trilogie de science-fiction de Liu Cixin (刘慈欣) (Problème à trois corps ; La forêt sombre ; La Mort immortelle).